Prix garanti bord champ (campagne 2023-2024): Cacao 1000 Fcfa/Kg;  Café  900 Fcfa/Kg

samedi 27 avril 2024
sys bannière

Reportage//Lutte contre la migration irrégulière au Maroc// Quand les professionnels de la mode décident de ‘fixer’ les jeunes talents africains…

Facebook Twitter LINKEDIN
Reportage//Lutte contre la migration irrégulière au Maroc//  Quand les professionnels de la mode décident de ‘fixer’ les jeunes talents africains…

Malgré les différentes campagnes de sensibilisation, la migration irrégulière continue de tuer les jeunes africains. Au Maroc, des artistes, hommes de culture et spécialistes de la mode, ont décidé de fixer les jeunes talents africains. Reportage…

Ce Jeudi 04 Mai 2023, il est 9 heures. Nous sommes à Rabat ; la capitale administrative du Maroc. Ce dans le cadre des festivités de l’édition 2023 Africa fashion talents (Afrifata), dédié à la mode et à l’émergence des jeunes talents africains. Afrifata, un incubateur social initié par Afmad dont la président est Zaineb Karroumi El Kadiri. A cette heure de la journée, il fait un temps chaud. Le Théâtre national Mohammed V qui abrite les festivités, a fait sa cure de jouvence. Sur l’esplanade de la sexagénaire bâtisse, les stylistes et modélistes venus de plusieurs pays africains dont la Côte d’Ivoire, la Mauritanie, le Togo et le Cameroun entre autres, s’activent à exposer leurs modèles taillés dans du tissu de chez eux. Il faut faire vite, pour prendre place dans le Halle du 1er étage aménagé pour la circonstance. C’est ici qu’auront lieu, le show et les différents panels. Pour y accéder, il faut prendre les marches qui, pour la circonstance, ont été habillées d’un tapis royale rouge. On se croirait au Festival de Canne en France.

Sur place, des artistes – peintres accrochent sur les simaises, de très beaux tableaux. Il s’agit d’une vingtaine de tableaux des artistes peintres sénégalais, Daouda Ndiaye et du marocain Noureddine Tabété. Cette exposition comporte des dizaines de tableaux. De très beaux tableaux qui attirent les amateurs d’œuvres d’art de haute qualité. Certaines portent sur la thématique de la migration irrégulière. Le confrère D. Cheickna ne demande pas mieux ! Oui, migration illégale bien connue en Afrique au sud du Sahara,( Côte d’Ivoire, au Sénégal… )sous l’ appellation populaire « immigration clandestine ».


Avec Daouda Ndiaye, artiste- peintre sénégalais, à qui l’on pourrait attribuer la cinquantaine, nous prenons rendez-vous, pour parler ce fléau qui tue chaque année, de millier de jeunes africains. Indiquons qu’en quête d’un avenir meilleur, ils sont de milliers de jeunes africains qui tentent périlleusement, de traverser le désert du Sahara et la Mer méditerranée sur des embarcations de fortune, pour atteindre ‘Bako’, ou l’autre côté de la rive en malinké. Ceux qui partent de la Côte d’Ivoire, dans la plupart des cas et qui ont les moyens de s’offrir un billet d’avion pour rallier les deux pays, passent par le Maroc.

Pourquoi le Maroc ?

« Car, il n’existe pas de visa entre les deux pays, depuis des décennies. Mais une fois au Maroc, ils se trouvent être pris dans une nasse. Le temps d’atteindre les côtes espagnoles, ils s’adonnent à de petites activités de plongeurs dans la restauration rapide ou de main d’œuvre agricole dans les champs d’olivier et de blé », nous explique un membre de l’Organisation international pour la migration(l’Oim), en mission dans Royaume chérifien mais avec qui nous n’avons pas le temps d’approfondir nos échanges, malheureusement…

Il est dix heures 30mn, heure locale. Tous les invités sont là et la cérémonie de lancement d’Afrifat2023 peut commencer. La sonorisation crache un rythme arabique. Le mercure monte et la commissaire générale d’Afrifata 2023, Zaineb Karroumi El Kadiri devant une forêt de microphones, de cameras et sous les crépitements des appareils photo commence son discours. La gorge nouée par l’émotion, elle commence par remercier le gouvernement marocain, les différents partenaires et designers invités. Bref, elle a dit toute sa gratitude à tous les partenaires qui n’ont pas lésiné sur les moyens pour soutenir ce festival.

L’art et la mode pour fixer les jeunes talents africains

La culture, l’art et la mode sont une opportunité pour les jeunes africains, de profiter de multiples formations et la possibilité aussi d'avoir accès à un réseau d'orientation international privilégié de connaissances dans le milieu du design de la mode et de la production sur sélection pour participer au concours des jeunes talents avec remise de prix pour le gagnant un voyage Fashion dans une Fashion week internationale et un suivi entrepreneurial.
«Je voudrais profiter également de l’occasion pour rendre hommage à l’Afrique. Merci aux partenaires et au ministère qui nous ont fait confiance. Nous voulons faire des jeunes créateurs de la mode, des acteurs de demain. Il y a l’art en Afrique. », a dit Zaineb Karroumi El Kadiri.
Pour M. Mohamed Ben Yacoub, directeur des arts au ministère de la Culture, la jeunesse et de la communication ne dira pas le contraire aux jeunes stylistes venus entre autres du Maroc le Congo Brazzaville, le Sénégal, la Mauritanie, la Côte d'Ivoire, Emirates Arabe unies et de l’Angola. Puis, s’adressant à la jeunesse africaine qui viennent faire des études au Maroc, il leur a demandé de continuer assidument leurs études. Car, dira Ben Yacoub, « il y a des marchés et des opportunités ici. Continuez d’apprendre. Mes encouragements à la fondatrice de ce festival qui est une excellente opportunité de construction de la culture et de l’Afrique. Quelle belle opportunité offerte aux jeunes créateurs et designers africains qui doivent valoriser les potentialités inestimables qui existent sur le continent »

Des étudiants africains se prononcent…

Par ailleurs, des étudiantes africaines qui fréquentent des grandes écoles de modes et de l’hôtellerie rencontrés en marge de ce festival, disent qu’elles, n’entendent pas aller à l’aventure après leur formation. C’est le cas de la ravissante P. Gomes. Elle a 18 ans est d’origine capverdienne, P. Gomes nous apprendra qu’elle suit des cours de couture dans une grande école de haute couture de Rabat. « Ma formation est financée par mes parents qui attendent beaucoup de moi. Après ma formation, je vais retourner au pays. Où ma mère ; elle aussi couturière, va m’engager dans son atelier. Toutefois je vais profiter des occasions qui s’offriront ici à moi. Pas question de traverser la mer de façon clandestine. », dit-elle. Un avis partagé par Miss Kwassey, 18 ans d’origine Ghanéenne qui a plein d’idées dans la tête. Surtout dans la valorisation des pagnes tissés au pays de Kwame Nkrumah. « Nous voulons bien retourner au pays. Mais, il faut que nos Etats nous accompagnent comme c’est bien le cas ici au Maroc. Car, une chose est de se former à grand frais, une autre est de retourner au pays et d’aller chômer. (…) Malheureusement », dit-elle.

Concrètement que fait le Maroc pour lutter contre la migration clandestine ?

Sur place, dans le royaume chérifien, les initiatives ne manquent pas. Pour réguler voire lutter contre la migration illégale. Adoptant une approche holistique en matière de lutte contre la migration illégale, le Maroc ne cesse de déployer des efforts considérables, en priorisant le renforcement de la coopération et de la coordination avec ses voisins du nord, notamment l'Espagne.
« Sur le plan opérationnel, le Royaume a toujours insisté sur la nécessité de faire une distinction nette entre les victimes de ce phénomène qu'il faut protéger et les réseaux de trafic des migrants auxquels il faut opposer une fermeté absolue. Le Maroc, qui n’a pas pour vocation d’être le gendarme de l’Europe, a toujours estimé que cette problématique doit être traitée dans le cadre d’une responsabilité partagée et d’un partenariat bien défini aussi bien avec l’Espagne qu’avec l’Europe en général. », Hassane, nous explique un confrère de l’Agence marocaine de presse,(Map).

Dans ce cadre, se tiennent régulièrement des réunions entre les responsables des deux pays, dont celle du Groupe migratoire mixte permanent maroco-espagnol tenue, début Mai 2023 à Rabat. La réunion, qui intervenait après une période d’interruption en raison du contexte imposé par la crise sanitaire due à la propagation de la Covid-19, a permis à la partie espagnole d’exprimer ses remerciements pour les efforts d'envergure déployés par les autorités marocaines en matière de lutte contre la migration illégale avec des résultats tangibles. (Voir encadrés)
Mais comment faire pour fixer les jeunes africains sur place grâce aux métiers des arts et de la mode ?

Khalid Tamer, Directeur artistique, metteur en scène d'origine marocaine, et le premier président africain de la Commission internationale du théâtre francophone, a sa petite idée.
« Les jeunes africains ont du potentiel qu’il faut valoriser. Mais l’ignorance empêche de voir toute la créativité et la force de l’Afrique. Cette jeunesse qui veut partir de l’autre côté, manque la créativité et un savoir-faire pour l’accompagner. », indique- t-il.


Mais en quoi consisterait l’accompagnement ?


Pour Khalid Tamer, « C’est d’abord le pouvoir politique économique et la société civile pour parler à la jeunesse africaine qui a soif d’apprendre. Mais aussi et surtout à connaitre sa culture. Ce qui lui permettra de mieux s’en raciner dans son continent. Les universités et les grandes écoles, on en a en Afrique. Mais ce qui nous manque ce sont les stratégies de donner à ces jeunes un espoir. Dans la société occidentale, les choix ne se sont pas arrivés un soir, mais au bout de 100ans. Il y a 60 ans que nous avons été décolonisés. Donc nous avons le temps, pour mettre en place des outils et des stratégies pour accompagner notre jeunesse. »

Heureusement au Maroc où les initiatives ne manquent pas, le Roi Mohammed VI a fixé le cap et la cadence suit de façon méthodique et bien organisée.

« C’est la volonté politique. Ici au Maroc, c’est le roi qui a emprunté sa marque à sa volonté. Nous pensons qu’Abidjan a repris sa place. Avant la guerre, ce n’était pas facile et c’était très compliqué. Aujourd’hui, Abidjan fait partie des capitales qui ont tous les atouts économiques et culturels pour devenir un véritable marché artistique, culturel et sociétal. », explique notre l’interlocuteur qui croie en la jeunesse africaine qui a du talent.
Pour Tamer, « Il faut donc créer de l’espoir pour aller de l’avant et l’Afrique est en marche. »

 

Bamba Mafoumgbé, envoyé spécial à Rabat(Maroc)

Légende photo : Une vue des panelistes et participants à Afrifata2023

Encadré 1 : Les engagements du Maroc contre la migration illégale
Sur la question migratoire, le registre du Maroc est très bien connu avec un bilan très édifiant. Ainsi, pour la seule année de 2021, le Royaume a réussi à avorter un total de 63.121 tentatives d’immigration et d'émigration irrégulière et à démanteler 256 réseaux criminels de trafic illicite de migrants, alors que 14.236 migrants ont été secourus en mer, selon des chiffres officiels.
Également, le Royaume du Maroc a également initié au profit des catégories de migrants vulnérables des programmes de retours volontaires assistés. Cette politique de retour volontaire constitue aujourd’hui un modèle de référence de la coopération Sud-Sud. Ainsi, 3500 retours volontaires concernant des étrangers en situation irrégulière au Maroc ont été organisés vers leurs pays d’origine, dont 2300 en partenariat avec l’Organisation internationale pour les migrations (Oim), alors que 49 assauts sur Sebta et Mellilia ont été avortés durant la même année.
Le bilan du premier trimestre 2022 confirme aussi cette détermination à toute épreuve. Ainsi, 14.746 tentatives d’immigration et d’émigration irrégulières ont été avortées, 52 réseaux criminels de trafic illicite de migrants démantelés et 97 personnes secourues en mer. Par ailleurs, 1080 retours volontaires concernant des étrangers en situation irrégulière au Maroc ont été organisés vers leurs pays d’origine, dont 600 en partenariat avec l’Oim et douze assauts sur Sebta et Melilia avortés. Malgré ces efforts, ce fléau continue d’attirer les jeunes africains.
La série noire continue pour les jeunes africains…
Indiquons que le premier trimestre 2023 a été le plus meurtrier pour les migrants qui tentaient de traverser la Méditerranée, depuis 2017.(Il s’agit de chiffres globaux certainement en l’Afrique et l’Europe.)Les premiers chiffres publiés par le directeur de l'Organisation internationale pour les migrations (Oim), Antonio Vitorino indiquent que 441 décès ont été enregistrés entre janvier et mars 2023. « La crise humanitaire qui persiste en Méditerranée centrale est intolérable. Avec plus de 20 000 décès enregistrés sur cette route depuis 2014, je crains qu'il y ait une normalisation de ces décès », a déclaré le directeur de l'agence de l'Onu pour les migrations.
Il a indiqué, en outre, que « les retards et les lacunes dans les opérations de recherche et de sauvetage menées par les États coûtent des vies humaines ». Ces retards dans les opérations de recherche et de sauvetage (Sar) ont été un facteur déterminant dans pas moins de six incidents depuis le début de l’année, entraînant la mort d’au moins 127 personnes sur un total de 441, indique l’Oim dans un communiqué, qui souligne que ce bilan « est en deçà de la réalité ». « Pendant le week-end de Pâques, 3 000 migrants ont atteint l’Italie, ce qui porte le nombre total d’arrivées depuis le début de l’année à 31 192 personnes », ajoute l’Oim comme rapporté par Anadolu Agency. Il faut mettre fin à la série noire, en fixant par exemple les jeunes africains sur le continent.
B. Mafoumgbé
Encadré 2 : L’artiste - peintre Daouda Ndiaye ne dit pas le contraire. Le regard fixé sur l’un de ses tableaux ne croit pas si bien dire quand il dit : Interview /Daouda Ndiaye, artiste plasticien sénégalais basé à Dakar
« J’ai toujours mis en avant l’encadrement des jeunes. »
Pouvez- vous nous dire l’objet de votre présence à ce festival ?

Je suis à Rabat, dans le cadre d’un festival artistique qui cherche à promouvoir les jeunes talents africains et pointer du doigt les richesses de l’Afrique. Parce que l’Afrique est un continent riche de talents. Il appartient aux jeunes africains d’y croire, de se fixer en Afrique et entreprendre des actions qui peuvent nous mener au développement.

C’est quoi concrètement ces actions ?
Entreprendre dans la synergie, tout ce qui pourrait nous aider à tendre vers un échange et une dynamique de création dans une certaine confiance. Nous avons les richesses, donc il n’y a pas de raison que nous ne puissions émerger.

Vous avez écouté les panélistes, ils ont parlé d’accompagnement des jeunes porteurs de projets fait défaut. ?

Cela a tendance à faire défaut, mais concrètement l’accompagnement qu’on peut leur apporter c’est le réarmement allant dans le sens de la confiance en soi. Les aspects matériels, ça vient après. Nos politiques doivent accompagner la jeunesse.
Pensez-vous que l’El Dorado comme le pensent des jeunes africains c’est en Europe qu’ils essaient de rejoindre en traversant périlleussement la Méditerranée ?
C’est loin d’être en Europe. Les richesses sont partout dans le monde. Chacun à sa richesse propre et L’El Dorado c’est chez nous en Afrique. L’immigration clandestine, c’est malheureux de le constater. Je le dis souvent aux jeunes qui gravitent autour de moi, ils ont un comportement suicidaire. C’est à nous qui avons vécu ailleurs, de tenir des discours de vérité aux jeunes. Des collègues me reprochent le fait d’accorder trop d’attention à la jeunesse. Moi, j’ai toujours mis en avant l’encadrement des jeunes. J’interviens beaucoup en milieux scolaire et ouvert toujours en direction des jeunes qui en ont besoin.
Bamba M.
Envoyé spécial à Rabat( Maroc)
Légende photo : D. Ndiaye, artiste- peintre sénégalais : « Je le dis souvent aux jeunes qui gravitent autour de moi qu’ils ont un comportement suicidaire.

 

 

 

 

 

 

 

 

sys bannière