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vendredi 26 avril 2024
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Covid-19 : Approvisionnement des populations en vivres// Dans le quotidien des femmes des ‘marchés Gouro’ d’Adjamé

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Covid-19 : Approvisionnement des populations  en vivres// Dans le quotidien  des femmes  des  ‘marchés  Gouro’ d’Adjamé

 Malgré la crise sanitaire  du Covid- 19,  les marchés  du vivrier  d’Abidjan continuent  d’être approvisionnés, par les sociétés   coopératives  animées par  des femmes : Les Létagonin.  Reportage  sur les deux  marchés  Gouro d’Adjamé…

Les Létagonin, femmes garçons ou  braves femmes en Gouro (ethnie du centre ouest de la Côte d’Ivoire), sont ces femmes- là qui approvisionnent  les marchés en vivriers dans grandes agglomérations de la Côte d’Ivoire. Connus sous l’appellation de marchés gouro, on en trouve  dans  plusieurs   communes   du District d’Abidjan voire  de l’intérieur du pays.  A  Adjamé, l’une   des communes les plus populeuses  de Côte  d’Ivoire,  durant la journée,   l’on trouve les  deux  plus grands  marchés  Gouro.   Entre couvre- feu et rumeurs de toutes sortes,    ces deux marchés ne sont  pas  fermés.  Même  si   la  Nouvelle   sociétés coopératives des commerçantes de vivriers,(  Nouvelle  Cocoprovi)  a fermé  son marché pour une désinfection et un  nettoyage  complet totale,  du  jeudi 26 mars au  samedi suivant, les activités commerciales et  les approvisionnements ont repris  le mardi  31 avril 2020.   Avec  sa   réouverture aux commerçantes et  aux populations. Passé ce temps  d’arrêt,  les deux marchés Gouro  d’Adjamé ont repris du service.   Vendeuses, ménagères et  petits voleurs à la tire    comme d’ordinaire sont au rendez- vous.   Même  si ce n’est pas la grande  affluence.  Nous  avons fait le constat le    vendredi 04 avril 2020.  Il  est 9heures. Le  soleil a  repris  irrémédiablement sa cours quotidienne vers l’ouest.  Nous sommes à l’entrée   du  siège de  la  nouvelle Société  Coopérative des commerçantes  du vivrier (Nouvelle Cocoprovi), propriétaire du marché gouro sis   au carrefour  Banfora-Adjamé Saint Michel. Devant l’imposant bâtiment  qui abrite le siège  de cette  société coopérative, il  est installé un dispositif  sanitaire : Un  seau à robinet  contenant  de l’eau javellisée  et  des flacons  de gel main hydro-alcoolisé.   A tous les visiteurs, le vigile de service les   enjoint  de se laver les mains avant  d’avoir accès  au bureau  de  Madame   Goley Lou Irie Yvonne,  la Pca de la  Nouvelle  Cocoprovi(  fondée par   feu Zamblé Lou Madeleine). La   ravissante    Goley Lou Irié,  qui nous reçoit   a    son   masque    bien  fixé  sur son visage et les gans  sur les deux mains reçoit visiteurs et collaborateurs n’a vraiment pas le temps de nous recevoir.
Pas facile  de faire respecter  les mesures barrières
Entre deux coups de fil, pour  s’assurer que les convois  de vivres en  provenance des zones de production de l’intérieur du pays,  vont arriver à temps,  elle nous explique les raisons  de la fermeture du marché  Gouro   de Saint Michel. « Dans le souci de lutter contre la pandémie mondiale du Covid 19 qui sévit actuellement, les femmes du marché gouro d’Adjamé, Nouvelle Cocoprovi, (…) ont  décidé  de fermer  du  dimanche 29 et lundi 30 mars 2020. Qui  ont été  consacrés à la désinfection et la dératisation du marché par les services d’hygiène du district d’Abidjan ».  Nous  explique-t-elle avant de nous confier à M. Djah  Alain, son assistant.  Après une  rapide balade   sur  le marché, nous serviteur  nous indique bien  que   ce n’est pas l’affluence des  grands jours.   Après la réouverture, nous  explique  M. Djah, « un service minimum est observé.  L’effectif des commerçantes  a été  réduit respectant la norme d’un mètre entre chaque étale comme  le gouvernement nous le conseille. Parmi toutes ces commerçantes, nous en avons  qui  occupent  deux voire trois places. A situation exceptionnelle, mesures  exceptionnelles.  On leur a dit que si vous avez deux places ou trois places  par exemple et que vous venez avec nos enfants  d’habitude,  qu’ils restent à la maison. Chaque  commerçante  dispose  d’une surface  d’un  mètre carré.  La  troisième mesure, est  qu’   il faut éviter que les commerçantes  se rapprochent les unes    des autres pour causer.  (…).  Le nombre d’entrées    a été   réduit à 4 au lieu des 12 entrées habituelles et  à chacune  d’elle nous avons  mis un kit de  lavage de main avec  du savon liquide, du gel hydro-alcoolique  et des vigiles  veillent  au grain(…). Tous  ceux  qui entrent doivent  se soumettre au lavage des mains(…) nous avons réduit  tous les mouvements  à l’essentiel surtout dans la main courante »  Constat ;  dans cet espace commerciale qui accueille plus   de 2500 personnes  par jour, les vieilles habitudes ont la peau dure. Devant  leurs étals, nous tombons  sur deux vendeuses en pleine causerie amicale  oubliant même de respecter l’une des mesures barrières : celle de un mètre entre deux personnes.  Très rapidement, elles sont rappelées à l’ordre.
 Vers  la  flambée des prix sur les marchés aux vivriers.
Il  est  11heures 30mn, nous mettons le cap sur l’autre marché  Gouro d’Adjamé- Roxy. Qui est géré par  la   Société  coopérative des marchés Gouro d’Abjamé,(  Comagoa). En  chemin, nous sommes frappés   par forte présence des femmes.  Assisses  devant leurs étals,   elles  vaquent à leurs occupations comme  d’habitude. Une forte odeur  de piment frais nous frappe les narines.   De l’autre côté,  une   semi-remorque chargée d’ignames   est en train   d’être  déchargée par une bande joyeuse  sans masques et autres moyens  de protection.   Le temps  de  fixer  des images, nous profitons de l’occasion   pour acheter  un peu de citrons.  Le  Kg  se négocie à 2000Fcfa  quand le demi est à  1000Fcfa.  C’est à prendre  ou à laisser.  Mais pourquoi  le citron  est tant prisé   ces dernier temps ?  Djeneba K.   La  trentaine environ, est    demi-grossiste basée dans la commune  d’Abobo.   Elle  s’active  à faire  le plein de son tricycle nous apprend : «   Il  parait  que le Thé au citron aide  à non seulement lutter contre le mal de gorge mais contre  le Coronavirus. C’est  ce  qui  se dit dans certains  milieux  chez nous à Abobo.   C’est pourquoi le  citron est  se fait de plus en plus rare.   Si   le Kg  se négocie à 2000 Fcfa,   chez les détaillants du quartier  la boule revient à 100Fcfa.Certains produits commencent à  se faire rares et il nous faut   faire face au charge des tricycles que nous louons ».  Sans blague.  Aussi,   il nous  a  été donné de constater une hausse  au niveau  du prix du sac   du riz  , du  Placally et  du Kilogramme  de la   de bœuf( Voir encadré).  Il est 12heures, le soleil est au zénith.  Dans notre randonnée, sous sommes parfois happés par les vendeurs  de masques en tout genre. Nous les esquivons tant bien que mal.  Il y en a pour tous les prix.500Fcfa, 1000Fcfa.   Un regard rapide ici et là,   achève  de convaincre  que      si   les dessous  des  tables des  vendeuses  en grande partie  des femmes Gouro, bété et malinké   sont bien propres , apparemment  nettoyés à l’eau,  et les couloirs très fluide,  ici aussi les mesures barrières notamment la distance  de un mètre entre deux personnes n’est pas respectée comme il se doit.  Mais pourquoi ? 12heures 30mn,  nous sommes  devant le siège   de la Comagoa.  Là aussi,  avant  d’y  accéder,  l’équipe de service pose sur notre visage le Thermo flash, 36° c’est bon. On  nous verse  du gel- main dans la paume droite avant de nous laisser entrer  dans le bureau de    M. Alexis Youan, Directeur général de la Comagoa.  A la première  question, il   est formel  quand il dit : «Nous n’avons pas attendu  l’appel du gouvernement pour procéder   à un nettoyage  de notre marché  occupé par plus de 2mille femmes en temps normal.  Parlant du Covid 19, nous l’avons négligée au départ et ne savons pas que ça allait avoir une telle proportion.  (…)  C’est une leçon  que dieu nous apprend. Nous avons commencé à placer le matériel  de lavage des mains lien avant.  En fonction de nos moyens, nous avons commencé à distribuer les gans, les masques à nos commerçantes et commerçants. Entre temps nous leur avons demandé de  s’en procurer. C’est par la suite que cette affaire de 1mètre est venue. Au début, nous  demandions à ceux qui venaient faire les achats  de se laver les mains avec  de l’eau javellisée et  du savon liquide.  Nous avons  demandé même  à nos membres de le faire.  Nous n’avons pas fermé, mais nous avons demandé à nos femmes de procéder à un balayage lourd sous leurs tables.  Nous avons également mis notre service d’entretien   à contribution ». Comme indiqué plus  haut,   un détour  sur   ces deux marchés que nous avons visités, tout comme    sur les marchés de quartier, l’on constate  une  flambée sur les prix à la consommation.  L’approvisionnement est devenu difficile.   Surtout  que nous sommes   dans le  mois de mars  et il n’y  a pas de pluie. « Les denrées  de premières nécessités se font rares parce que le sol est devenu dur. La banane, c’est   tout au plus trois mois.  Nous sommes  dans  une période exceptionnelle et  des produits de grandes consommations  sont devenus rares et très prisés ».  Nous explique M. Djah. Qui ne manque pas  d’ajouter  que le contexte  particulier lié au Covid 19  y est pour quelque chose.   Mais  comment   se fait l’approvisionnement du marché ?« Nous mettons une plateforme à la disposition des femmes. Si  vous prenez votre produit par exemple à Daloa, vous venez déposer. Les    grossistes ou  semi-grossistes  viennent récupérer  et ils   s’en vont. Le jeudi  02 avril 2020,  les deux  camions  qui sont arrivés   venaient de Daloa. Sur l’axe Daloa Abidjan, ceux qui  ont  de la marchandise,  s’appellent   et à chaque étape,  le camion prend la marchandise et ainsi de suite. Cela permet  de  partager les coûts de transports.(…) Une  remorque qui part   de Bouaflé à Abidjan,  c’est  400 mille Fcfa. Avec la rigueur du couvre- feu, les véhicules mettent plus de temps, pour arriver  sur  nos plateformes.  Ce qui visiblement a un coût .Sans  oublié   les avaries que doivent supporter les pauvres dames. Qui pourraient le répercuter sur le prix    à la consommation finale ». Cet avis  est partagé par M.  Alexis Youan, Directeur général de la  Société Coopérative des marchés gouro d’Adjamé. En nous recevant au siège de sa coopérative il précise : « Effectivement, étant donné que  des marchés ont été fermés notamment à Yopougon, nous observons  une certaine tension  sur les prix à la consommation.  Pour le moment le produit se fait rare en partie  à cause  de la saison sèche. Le vivrier  ne viennent plus assez.  Les  chargements   qui viennent  de l’intérieur du pays,  sont bloqués  en route ou  ne peuvent plus rentrer ici facilement. En outre, compte tenu de la situation, les gens ne travaillent plus assez.  Le peu de vivrier qui se trouvent en brousse,  ils ont  des difficultés pour aller  le chercher. Ici sur notre marché, normalement nos camions arrivent  toujours 24heures/24. Compte tenu du couvre-feu, il n’  y a plus assez  de livraisons. Les  camions  que nous utilisons d’ordinaire,  peuvent démarrer à 18heures pour arriver ici à 24 heures.  Même  les poids lourds  qui partent de Divo et Ndouci peuvent   se mettre en route à 18heures,  pour pointer ici à 22heures ». En guise  de souhait,  la plupart  des acteurs  de la chaine  d’approvisionnement interrogés  souhaitent  que  « le gouvernement  ouvre  un couloir humanitaire  pour les véhicules qui transportent les vivriers. Avec un macaron précis  comme au temps de la crise militaro-politique.  Cela permettrait  d’approvisionner régulièrement nos marchés. Plus ça devient cher, la population ne peuvent s’approvisionner comme il se doit. Des pères de familles étant au chômage».   Malgré  cette situation, les marchés de proximité continuent  d’être approvisionnés.  «  Ce n’est pas facile.  C’est ici  que  des femmes grossistes et demi- grossistes qui  sont  de véritables lèves-tôt,  viennent  s’approvisionner    pour aller   ravitailler  les marchés   de quartiers et  des villes  de la périphérie  Abidjanaise(…)».  Nous rapporte notre interlocuteur ;  M. Djah du  marché Gouro d’Adjamé- Saint Michel. En ce qui concerne  le soutien  annoncé par le gouvernement ivoirien au secteur du vivrier le Dg de la Comagoa  préconise : «Que  les  50 milliards de Fcfa annoncés  par le gouvernement partent  aux coopératives  et marchés  bénéficiaires  qui doivent être  recensées.  Que l’Office d’aide à la commercialisation  des vivriers( Ocpv) via le ministère du commerce  soit   responsabilisée. Car cette structure sert de pont entre les producteurs et les coopératives. L’Ocpv connait bien les producteurs et les coopératives» 
  Bamba Mafoumgbé,Cette adresse courriel est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
 Légende photo : Une vue  des femmes  sur l’un  des  marchés Gouro d’Adjamé. Difficile  de respecter les mesures  barrières. ( In Le Temps du 8 avril 2020)
Encadré :    Banane, aubergines, manioc… les prix grimpent
 Au marché Gouro d’Adjamé- Roxy,  le Kg   de viande  de bœuf   se négociait au moment  de notre passage à 2500 Fcfa  contre  environ 2200Fcfa   par le passé. En ce qui concerne le sac de pâte   de manioc qui est produit  à Bonoua, et   servant  à faire le placally  qui  se négociait à  15  mille Fcfa n’a certes pas changé.  Mais la quantité a fortement diminué. Selon Dame   Kouzia vendeuse de riz locale  qui s’approvisionne à Tiassalé,  «  le sac  de 50 Kg de riz  local    se négocie pour l’instant à 30 mille Fcfa. Nous sommes obligées de  vendre à ce prix puisqu’à cause de Coronavirus, les populations n’ont pas  d’argent. Aussi, le transport commence à  grimper. Si dans  les prochains jours, le prix augmente  chez nos fournisseurs de Tiassalé,  nous serons  obligés de suivre la tendance ». Qu’en est –il du sac   prix  du sac  d’aubergine ? «  Le  sac d’aubergine,   qui était à 3000Fcfa,   se négocie désormais  entre 15 mille  voire même à  20mille Fcfa. C’est  de ce  commerce que nous vivons. Ça  ne marche pas trop  mais il faut gagner un peu  pour nourrir  nos familles et  approvisionner la population… La  situation est devenue plus avec la crise sanitaire du Covid-19 ». En ce  qui concerne   le coût du transport, le prix   de la location  d’une   remorque    sur la distance  de  Bouaflé à Abidjan c’est  400 mille Fcfa.  
 B. Mafoumgbé
 Légende photo : Les prix  commencent à flamber  les marchés…
Ces braves femmes  appelées Letagonin…De Madame   Zamblé  Lou,  fondatrice  de la Cocoprovi, en passant par  feu Madame Boty  Lou  Rosalie, ex- Pca  de Cocovico, à Madame Irié Lou Collette,  la Président   de la Fédération nationale  des sociétés coopératives  du vivrier de  Côte d’Ivoire,( Fenacoovici), pour ne citer que  celles-là,  sont de  femmes battantes  dont les noms riment avec l’existence des marchés Gouro en Côte d’Ivoire dont les origines remontent  aux années 1970. Ben structurés   ces marchés  sont   dédiés essentiellement à l’approvisionnement  du grand Abidjan  en bananes plantains, gombo, piment et aubergines,  sont  adossés à  des  sociétés coopératives  animées   par   des  braves femmes. On les appelle les Letagonin. Qui  signifie   en Gouro,  ‘femmes garçons’ ou ‘braves femmes’.   Au sein de la Fenacoovici, par exemple dont la présidente du Conseil  d’administration  est  Irie lou Collette, qui   compte  1800 membres dont 85% de femmes.  Pas seulement  des femmes  Gouro ou Gagou mais aussi   des femmes Senoufo, Malinké( voir encadré 2). Qui de jour et de nuis et malgré  les crises militaro-politiques  qui ont  secouées  la Côte d’Ivoire, elles ont  mis  tout en œuvre  pour approvisionner  nos marchés.  En Côte d’Ivoire, il n’y a pas eu de largage de vivres. La Côte d’Ivoire était en crise, mais ce n’était pas une crise alimentaire. Ce  qui a fait dire  à Marie Noëlle Koyara,  ex- ministre d’Etat ministre du Développement rural de la République centrafricaine( Rca) et ex- représentante résidente  de l’Organisation mondiale pour l’alimentation,( Fao) en Côte d’Ivoire, que : «En Côte d’Ivoire, il n’y a pas eu de largage de vivres. Pendant tout le temps que votre pays était en crise, il y avait à manger sur le marché. Quand bien même  que je sois de la Fao, je me suis beaucoup inspirée du cas pratiques de la crise ivoirienne. Cela m’a beaucoup aidé(…) ».  
Bamba Mafoumgbé

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